Goncourt des lycéens: les jeunes couronnent Mathias Enard

Libération

Son livre s’est imposé au second tour, avec six voix sur 13, devant Fouad Laroui, et Virginie Despentes.

L'écrivain Mathias Enard à l'Hôtel Lutécia à Paris en 2008.
L'écrivain Mathias Enard à l'Hôtel Lutécia à Paris en 2008. (AFP) 

«Un poème qui fait 150 pages»: le jury du Goncourt des lycéens a couronné ce mardi le roman de Mathias Enard Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants (Actes Sud), après avoir rejeté la «vision cynique du monde» du Goncourt 2010, Michel Houellebecq. «On préférait quelque chose qui avait une profondeur qu’il n’y avait pas dans Houellebecq», a expliqué François-Xavier Jamin, 15 ans, venu de Toulouse, à l’issue des délibérations à huis-clos à Rennes. Le roman de Houellebecq avait été écarté vendredi de l’ultime sélection de sept livres. «Les phrases manquaient de finition... ou peut-être que ce n’est pas le style qui nous plait», précise Emeline Dutheil, 18 ans, lycéenne de Pessac.

«Je pense que c’est facile d’adopter un style cynique, alors que Enard a un style vraiment unique, son oeuvre c’est un poème pictural», a-t-elle ajouté, «Nous on voulait dénicher une perle, un joyau de la littérature». «Je pense que pour lire et apprécier Houellebecq, il faut une certaine maturité, avoir vécu un peu», a déclaré de son côté Bernard Pivot, membre de l’académie Goncourt venu soutenir les lycéens. Au bout du comtpe, à l’issue d’un «dialogue contradictoire, très énergique» selon Emeline, le livre de Mathias Enard s’est imposé mardi au second tour, avec six voix sur 13, devant Fouad Laroui, Une année chez les Français (Ed . Julliard), trois voix, et Virginie Despentes, Apocalypse Bébé (Ed Grasset), deux voix.

Une écriture splendide

«On s’est mis d’accord sur le fait que c’est un livre très poétique», explique Clara Corrèze, 14 ans et demi, lycéenne parisienne. «Il a réussi à nous faire voyager pendant tout son roman», commente Chedlia Neffati, présidente du jury, du lycée Henri Matisse de Vence. «Une écriture splendide», a commenté Pivot, qui s’est dit «assez étonné de voir que les lycéens choisissent des livres qui parlent non pas du monde d’aujourd’hui mais du monde d’hier». «Nous sommes attachés à l’esthétique, et ce livre est très esthétique», a répondu Clara Grebot, 15 ans, élève au lycée français de Budapest. «C’est un très beau livre, très poétique, très agréable à lire», a-t-elle ajouté.

Créé en 1988 et organisé par le ministère de l’Education nationale et la Fnac, le Goncourt des lycéens permet à 2.000 élèves de 15 à 18 ans de lycées généralistes ou professionnels de lire et étudier en deux mois les 14 romans de la sélection de rentrée de l’Académie Goncourt. Le 22e prix Goncourt des lycéens avait été décerné en 2009 à Jean-Michel Guenassia pour Le club des incorrigibles optimistes (Albin Michel). Selon une étude de l’institut de marketing Gfk, le livre couronné par le Goncourt des lycéens s’est vendu en moyenne à 125.000 exemplaires (400.000 pour le Goncourt). Dans un communiqué, le ministre de l’Education nationale Luc Chatel a félicité les jurés d’avoir choisi «un hymne à la rencontre des cultures et à la puissance créatrice de l’art», et salué le «remarquable travail critique accompli» par les lycéens.

(Source AFP)

http://www.liberation.fr/livres/01012301297-goncourt-des-lyceens-les-jeunes-couronnent-mathias-enard

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